Tristram Gräbener, Life and Opinions

Pourquoi je me suis syndiqué

2018-12-20

Il y a deux ans et demi, dans un blogpost, j’avais conclu que se syndiquer aurait pu être une piste pour maintenir un peu de démocratie au sein de l’entreprise.

J’ai finalement passé ce cap en juillet ; j’ai adhéré à la CNT. J’ai choisi ce syndicat anarchiste par sympathie pour le communisme anti-autoritaire et parce que les syndicats de la fédération CNT sont organisés par industrie. Ainsi, dans une entreprise, il n’y aura pas un syndicat pour les cadres et un autre pour les travailleurs, comme cela peut arriver à la CGT (ce qui n’aide pas trop la lutte des classes...).

Mais pourquoi diable se syndiquer lorsque tout baigne pour moi ? Côté privilèges, je suis au top : mâle blanc, cisgenre, milieu trentaine, fils d’intellos, trop diplômé, aimant un métier très porteur. Côté boulot, j’ai toute la protection sociale d’un salarié tout en pouvant faire la fine bouche grâce à Codeurs en Liberté, à temps partiel tout en gagnant presque trois fois le SMIC.

Je vois trois raisons : se confronter à la réalité, anticiper des conflits et changer la société.

Is this real life?

Entre mes amis d’école d’ingénieur, les collègues, je traine essentiellement un milieu très homogène, parmi les 20% des revenus les plus élevés de France (voire 10% !). Nos discussions politiques sont généralement hors sol. Soit très théoriques, soit très techniques, mais déconnectées d’un bon nombre de réalités.

Les rencontres mensuelles du syndicat comportent un tour de table pour échanger sa situation, celle de son lieu de travail, les relations avec la hiérarchie et les autres syndicats.

Les échanges, les conseils et avertissements des camarades permettent de mieux se rendre compte de toute la machinerie managériale qui se répète et se ressemble quelles que soient les entreprises.

Le taylorisme et la division du travail sont toujours présents, juste noyés dans un vocabulaire trompeur et un paternalisme déguisé en bienveillance.

Démissionner c’est renoncer

Ce regard plus critique et expérimenté permettra d’être plus alerte et prévenir des problèmes.

En effet, en informatique nous avons la fâcheuse tendance à laisser une situation pourrir (par manque de vigilance, par flemme, par confiance en la direction) jusqu’à ce qu’elle devienne invivable, provoquant des vagues de démissions.

C’est confortable : la nouvelle ligne sur le CV est valorisée, le salaire augmenté et les nouveaux défis sont motivants.

Mais c’est dommage de laisser en permanence la situation d’une entreprise se dégrader, non ? N’avons-nous pas envie de construire quelque chose de plus durable ?

Changer la société

Bien sûr il y a la volonté de pouvoir faire notre métier.

Mais au-delà, il y a la volonté d’arriver à une société où chaque personne serait libre, c’est-à-dire ne subissant aucune forme de domination. Et l’anarcho-syndicalisme est pour moi un moyen d’expérimenter de nouvelles formes de travail et préparer les esprits et les pratiques pour la révolution à venir.

Et toi, camarade, tu te syndiques quand ?